« Moi, j'avais l'idéal logé
dans un coin de ma cervelle, et il ne me fallait que quelques jours
d'entière liberté pour le faire éclore. Je le portais dans la
rue, les pieds sur le verglas, les épaules couvertes de neige, les
mains dans mes poches, l'estomac un peu creux quelquefois, mais la
tête d'autant plus remplie de songes, de mélodies, de couleurs, de
formes, de rayons et de fantômes. Je n'étais plus une dame, je
n'étais pas non plus un monsieur. On me poussait sur le trottoir
comme une chose qui pouvait gêner les passants affairés. Cela
m'était bien égal, à moi qui n'avais aucune affaire.
On ne me
connaissait pas, on ne me regardait pas, on ne me reprenait pas ;
j'étais un atome perdu dans cette immense foule. »
(George Sand - Histoire de ma vie,
IV, 14)
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