jeudi 31 octobre 2013

« On pense toujours au couchant comme à de l’or, c’est-à-dire à la couleur jaune, de sorte que cette couleur qui est ma préférée est la couleur de ma vie, celle du commencement et celle de la fin. Je suis content de ne pas avoir perdu le jaune, mais j’éprouve aujourd’hui la nostalgie du noir. » (Borges)






« Adieu Camille. Retourne à ton couvent. Et lorsqu'on te fera encore de ces récits hideux qui t'ont empoisonnée, réponds ce que je vais te dire : Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux ou lâches, méprisables et sensuels; toutes les femmes sont perfides, vaniteuses, menteuses, curieuses et dépravées; et le monde entier n'est qu'un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange; mais il y a dans ce monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux... On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux, mais on aime. Et, quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière et on se dit : J'ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j'ai aimé. C'est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui. »

("On ne badine pas avec l'Amour"- Musset cité dans "Billie" d'Anna Gavalda)

lundi 28 octobre 2013

« Celui qui souffre seul,souffre surtout par imagination; mais l’âme dompte aisément la souffrance, quand sa douleur a des camarades d’épreuve. » (William Shakespeare-Le roi Lear)
















     

     
    « Je me suis retrouvé dans ce monde-ci un beau jour – je ne sais lequel – 
    et où, jusque là,  j'avais vécu sans rien sentir. 
    Lorsque j'ai demandé où je me trouvais, tout le monde m'a trompé, 
    chacun contredisant tous les autres. 
    Si j'ai demandé ce que je devais faire, tout le monde m'a leurré, 
    chacun me répondant une chose différente. 

    Si, ne sachant où aller, je me suis arrêté en chemin, tout le monde s'est étonné que je ne m'engage pas sur cette route dont nul ne savait où elle menait, ou que je ne revienne pas en arrière – alors que, réveillé à la croisée des chemins, j'ignorais même d'où je venais. 

    Je vis que je me trouvais sur une scène et que je ne savais rien de mon rôle, alors que les autres se mettaient à réciter le leur, sans le savoir d'avantage. 
    Je vis que j'étais habillé en page, mais nul ne me donna ma reine, ce dont je fus blâmé. 
    Je vis que je tenais à la main le message qu'il fallait transmettre, 
    et quand je leur dis que la feuille était blanche, ils se moquèrent de moi. 
    Et je ne sais toujours pas s'ils se sont moqués de moi parce que les feuilles sont toujours blanches, ou bien parce qu'il faut toujours deviner les messages.

    Finalement, je me suis assis sur une pierre, à la croisée des chemins, 
    comme auprès du foyer que je n'ai jamais eu. 
    Et j'ai commencé, une fois seul, à faire des bateaux de papier 
    avec le mensonge que l'on m'avait donné. 
    Personne n'a voulu me croire, même comme menteur, 
    et je n'avais pas de lac pour prouver ma vérité. » 

    (Fernando Pessoa – Le Livre de l'Intranquillité)

mardi 8 octobre 2013

« L'alternative ? Retomber dans la barbarie ou commencer l'histoire.» (Horkheimer - Eclipse de la Raison)


« On peut fort bien vivre sans âme, il n’y a pas de quoi en faire une histoire, cela arrive très souvent. Le seul problème, c’est que les choses ne viennent plus vers vous, 
quand vous les appelez par leur nom.  » 
 (Christian Bobin)

vendredi 4 octobre 2013

«Toutes les pièces de théâtre ont fini par créer un monde à côté de la vie, qui se fait illusion à lui-même et finit par se croire vivant.» (Jules Renard)










 
Au détour d'un écran,
j'entrevois une main qui se lève
et c'est l'éternité.
Alors je pense à celui
lu et relu hier
à sa parole exigeante
scellée dans le papier.

"On prend le temps de respirer toute la dormeuse
mais sur une passante on se retourne déchiré
d'un seul coup par ce sourire imprévisible
surgi d'enfance en souvenir d'on ne sait quoi
un sourire venu à fleur et resté comme une ombre
offerte et retirée à tous les promeneurs

depuis que tu marches et te souviens tu cherches
l'ange oublié l'ange apparu de bouche en bouche
le chiffre des visages aimés dont la caresse
à la musique douloureuse est brusquement parue
et repartie s'enfouir à jamais dans l'allure
ayant cité ce mystérieux sourire d'autrefois"

(Ludovic Janvier-"D'un sourire"-"Doucement avec l'ange")