mardi 29 avril 2014

« Où en est l’histoire ? » – « Il ne doit plus en rester grand-chose de l’histoire à présent. » (Maurice Blanchot - l’Attente – l’Oubli)






« Paris a un enfant et la forêt a un oiseau ; l'oiseau s'appelle le moineau ;
l'enfant s'appelle le gamin.

Accouplez ces deux idées qui contiennent, l'une toute la fournaise, l'autre toute l'aurore, choquez ces étincelles, Paris, l'enfance ; il en jaillit un petit être. Homuncio, dirait Plaute.

Ce petit être est joyeux. Il ne mange pas tous les jours et il va au spectacle, si bon lui semble, tous les soirs. Il n'a pas de chemise sur le corps, pas de souliers aux pieds, pas de toit sur la tête ; il est comme les mouches du ciel qui n'ont rien de tout cela. Il a de sept à treize ans, vit par bandes, bat le pavé, loge en plein air, porte un vieux pantalon de son père qui lui descend plus bas que les talons, un vieux chapeau de quelque autre père qui lui descend plus bas que les oreilles, une seule bretelle en lisière jaune, court, guette, quête, perd le temps, culotte des pipes, jure comme un damné, hante les cabarets, connaît des voleurs, tutoie des filles, parle argot, chante des chansons obscènes,
et n'a rien de mauvais dans le cœur. C'est qu'il a dans l'âme une perle,
l'innocence, et les perles ne se dissolvent pas dans la boue.
Tant que l'homme est enfant, Dieu veut qu'il soit innocent.

Si l'on demandait à la grande et énorme ville : Qu'est-ce que c'est que cela ?
elle répondrait : C'est mon petit. »

(Victor Hugo, Les Misérables - Tome III. Marius, Livre Premier : Paris étudié dans son atome – Chapitre 1. Parvulus)

vendredi 25 avril 2014

« La poule n'est que le système qui permet à un œuf de produire un autre œuf. » (Samuel Butler)




« ... pour ma part, je considère que les mots sont surtout utiles quand ils dégagent des perspectives attrayantes et nouvelles. Mais l'usage des mots est tellement mal compris par nos civilisations, qui croient encore aveuglément à un univers mécanique uniquement régi par des relations de cause à effet, idéalement réductibles à une grande Cause première et à un Effet génésique absolu. » 

(Frank Herbert, "L'Empereur-Dieu de Dune")

samedi 19 avril 2014

"J'ai cherché dans l'absence un remède à mes maux(...). J'ai trouvé le silence et jamais le repos." (Jean-Claude Pirotte, "Brouillard")







« Mais avant d’arriver au vers final, il avait déjà compris qu’il ne sortirait jamais de cette chambre, car il était dit que la cité des miroirs (ou des mirages) serait rasée par le vent et bannie de la mémoire des hommes à l’instant où Aureliano Babilonia achèverait de déchiffrer les parchemins, et que tout ce qui y était écrit demeurait depuis toujours et resterait à jamais irrépétible, car aux lignées condamnées à cent ans de solitude,
il n’était pas donné sur terre de seconde chance. » 

(G.Garcia Marquez, Cent ans de Solitude)

lundi 14 avril 2014

''C'est en chacun de vous qu'il faudra tuer le dragon..." (Evgueni Scwartz)






«  - Du flan, que du flan. Ils sont terribles, mes hommes. Des plus terribles, on n'en trouve pas. C'est mon œuvre. C'est moi qui les ai taillés.

- Quand même, ce sont des hommes.

- De l'extérieur, seulement.[...] Si tu voyais leur âme, ah ! Tu aurais des frissons. [...] Tu t'enfuirais même en courant. Tu ne serais pas prêt à mourir pour des estropiés. C'est moi personnellement, mon ami, qui les ai estropiés. Et je les ai estropiés autant que c'était nécessaire. Les âmes des hommes, mon ami, tiennent beaucoup à la vie. Tranchez un corps en deux, l'homme crèvera. Mais déchirez-lui son âme, il deviendra docile, un point c'est tout. Non, non, des âmes comme ça on en trouve nulle part. Que dans ma ville. Des âmes manchotes, des âmes cul-de-jatte, des âmes sourdes et muettes, des âmes à la niche, des âmes au gibier, des âmes damnées. Tu sais pourquoi le bourgmestre fait semblant d'être un malade mental ? Pour cacher qu'il n'a strictement aucune âme. Des âmes percées, des âmes vénales, des âmes de faux jetons, des âmes mortes. 
Ah ! Oui, c'est dommage qu'elles soient invisibles.

- C'est une chance pour vous.

- Comment ça ?

- Les gens auraient peur en voyant, de leurs propres yeux, à quoi leurs âmes ont été réduites. Ils iraient droit à la mort, au lieu de rester un peuple soumis.
Qui vous nourrirait alors?

- Le diable seul le sait, peut-être que vous avez raison. […] »

(Evgueni Schwartz – Le Dragon)

vendredi 11 avril 2014

« Je pense souvent à cette expression “prendre l’air”. Cela veut dire que l’on va ailleurs, pour le trouver. Cela veut dire littéralement : où je suis, je m’asphyxie. » (David Foenkinos - Nos séparations)










  The Circle - Blackmore's Night

" I've been here for a million years
Through the joy, through the tears
But when I am gone this will go on
And the circle starts again...

I've watched the mountains rise from dust
Saw the gold return to rust
I had cried when the oceans died
And the circle starts again...

I was here when the world began to turn
Kissed the sun as it started to burn
The whispering at the reckoning said
"The circle starts again"

The moon was rising from above
I caught her eye and thought it was love
But she turned her back, the sky went black
And the circle starts again...

I danced through castles made of stone
Walked the desert sands alone
In the midnight hour you feel the power
And the circle starts again...

Now the question falls to you, my friend
No begining has no end
Will we ever learn, will the world still turn,
Will the circle start again?"

mercredi 9 avril 2014

« Qui sait ? Il n’y a pas de vérité en ce monde et même dire cela est un mensonge. » (B.Scott)




« Tu seras belle à ma manière. Tu aimeras ce que j’aime et ce qui m’aime : l’eau, les nuages, le silence et la nuit ; la mer immense et verte ; l’eau uniforme et multiforme ; le lieu où tu ne seras pas ; l’amant que tu ne connaîtras pas ; les fleurs monstrueuses ; les parfums qui font délirer ; les chats qui se pâment sur les pianos et qui gémissent 
comme les femmes, d’une voix rauque et douce !

Et tu seras aimée de mes amants, courtisée par mes courtisans. Tu seras la reine des hommes aux yeux verts dont j’ai serré aussi la gorge dans mes caresses nocturnes ; de ceux-là qui aiment la mer, la mer immense, tumultueuse et verte, l’eau informe et multiforme, le lieu où ils ne sont pas, la femme qu’ils ne connaissent pas, les fleurs sinistres qui ressemblent aux encensoirs d’une religion inconnue, les parfums qui troublent la volonté, et les animaux sauvages et voluptueux 
qui sont les emblèmes de leur folie. »
    (Les bienfaits de la Lune - Baudelaire)