lundi 29 mai 2017

Nous ne sommes savants que de la science présente. (Montaigne - Essais, I, XXV)





"Je suis a priori contre tous ceux qui croient avoir absolument raison. (...) Je suis contre tous les systèmes politiques qui croient détenir le monopole de la vérité. Je suis contre tous les monopoles idéologiques. (...) Je vomis toutes les vérités absolues et leurs applications totales. Prenez une vérité, levez-la prudemment à hauteur d'homme, voyez qui elle frappe, qui elle tue, qu'est-ce qu'elle épargne, qu'est-ce qu'elle rejette, sentez-la longuement, voyez si ça ne sent pas le cadavre, goûtez en gardant un bon moment sur la langue – mais soyez toujours prêts à recracher immédiatement. C'est cela, la démocratie. C'est le droit de recracher."

(Romain GARY, l'Affaire d'homme)

vendredi 19 mai 2017

Aulë trouve sa joie et sa fierté dans l’acte de création et dans le résultat de cette création, non dans sa possession ni dans sa maîtrise. C’est ainsi qu’il donne et ne garde pas par devers lui, qu’il est libre de tout souci et passe sans cesse à une œuvre nouvelle. (J.R.R. Tolkien)

 
Je ne suis pas encore mort, encore seul,
Tant qu'avec ma compagne mendiante
Je profite de la majesté des plaines,
De la brume, des tempêtes de neige, de la faim.

Dans la beauté, dans le faste de la misère,
Je vis seul, tranquille et consolé,
Ces jours et ces nuits sont bénis
Et le travail mélodieux est sans péché.

Malheureux celui qu'un aboiement effraie
Comme son ombre et que le vent fauche,
Et misérable celui qui, à demi mort,
Demande à son ombre l'aumône.

(Janvier 1937, Voronèje - Ossip Mandelstam, Simple promesse)



mercredi 17 mai 2017

Nous ne voyons pas les choses telles qu’elles sont, mais telles que nous sommes. (Anaïs Nin)

 
- Tu parles de dettes à acquitter, répliqua Thot sans s'émouvoir. Celle que j'ai à ton égard parce que tu m'as servi; celle que tu as contractée envers Seth pour t'avoir débarrassé de la malédiction que je t'infligeais. Je constate pourtant que tu es toujours aussi fier, prince, toujours impénitent. Car tu as commis un péché bien plus grave, le seul qui compte, et, malgré toutes ces années de souffrances, tu es encore incapable de le reconnaître […]. Si tu le nommes maintenant, magicien, tu peux encore être pardonné.[…]

Le prince chercha frénétiquement la réponse que Thot escomptait. Quel péché? Je l'ai servi, pensa-t-il avec aigreur. J'ai souffert. Que peut-on encore attendre de moi?

- Il m'est impossible de le nommer, car je ne crois pas qu'il existe, dit-il enfin. J'ai satisfait aux exigences des dieux et me suis efforcé de bien agir. Que peut-on demander de plus?

Thot secoua son long bec d'ibis d'un air pensif. Derrière lui, les babouins se mirent brusquement à pousser des piaillements irrités, puis se turent.

- Dettes et créances, services rendus et charmes contraignants, murmura le dieu. Rien de tout cela ne trouble le grand lac d'orgueil qui forme l'essence de ton être. Tes souffrances n'ont même pas ridé sa surface. Tu crois toujours qu'il suffit que tu t'acquittes de tes obligations spirituelles pour mériter une récompense, l'annulation d'une dette ou la disparition d'une souffrance que tu considères comme injuste. Ces années ne t'ont 
rien appris d'autre que le ressentiment, prince.

(Le tombeau de Saqqarah – Pauline Gedge)


vendredi 12 mai 2017

Soir délicieux, où le corps entier n’est plus qu’un sens, et par tous les pores absorbe le délice. Je vais et viens avec une étrange liberté dans la Nature, devenu partie d’elle-même.(Henri David Thoreau)

 
"Je leur dirai que rien n'a d'importance sauf une chose: les branches d'acacias et de poiriers, les platanes du début du printemps lorsque la pluie menaçait, ces espaces exigus qui se métamorphosaient en immenses contrées dès que nous y grimpions, et les feuillages qui dansaient sous l'effet de la brise et du vent, je leur dirai que rien aujourd'hui ne me semble avoir plus d'importance que le bruit du vent dans les arbres, que la seule chose au monde que je regretterai à l'instant où j'en terminerai avec cette comédie de la vie ce sera cela, (...) la brise, les branches qui s'agitent, les jeux de lumière dans les feuilles, l'approche de la pluie, et le chuchotis infini, puissant et mystérieux, 
du vent dans les arbres."

(Christian Garcin, Du bruit dans les arbres)

jeudi 4 mai 2017

'Qu'est-ce qu'il est bruyant ce p'tit protozoaire!' (La Mort, à propos de Dean Winchester - Supernatural)

  
N'allez pas au bois d'Ormonde,
Jeunes filles n'allez pas au bois:
Il y a plein de satyres, de centaures, de malins sorciers,
Des farfadets et des incubes,
Des ogres, des lutins,
Des faunes, des follets, des lamies,
Diables, diablots, diablotins,
Des chèvre-pieds, des gnomes, des démons,
Des loups-garous, des elfes, des myrmidons,
Des enchanteurs et des mages,
Des stryges, des sylphes, des moines-bourrus,
Des cyclopes, des djinns, gobelins,
Korrigans, nécromants, kobolds...
N'allez pas au bois d'Ormonde.

(Maurice Ravel, Trois chansons - Ronde)


lundi 1 mai 2017

-Êtes-vous classifié comme humain ? -Négatif, je suis une mite en pull-over. (Le 5e élément)

 
"Si vous voulez connaître un mystique, ne limitez pas votre recherche aux monastères et aux temples, mais cherchez-le aussi sur les grandes routes et dans les petits chemins, dans les villes et les hameaux et dans la bousculade et le remue-ménage des grands centres cosmopolites du monde. Quand vous trouverez un homme qui est actif, studieux, compatissant, aimé de ses amis et de ses voisins, tolérant dans le domaine religieux et qui peut vous montrer la magnificence et la puissance de Dieu dans la plus simple des choses, vous avez trouvé un mystique. Avec ces qualités, qu'il porte 
une robe sacerdotale ou une salopette d'ouvrier, c'est un mystique."

(Ralph LEWIS)