vendredi 6 février 2015

«La vie à son meilleur est un processus fluide et changeant en lequel rien n'est fixé.» (Carl Rogers)


« Les anciens dieux n'étaient pas morts, ils vivaient dans les forêts, les lacs et les sources, les hommes les connaissaient, les rencontraient parfois, ne les craignaient guère. En échange d'une aide, d'une faveur, ils leur faisaient des cadeaux, un pigeon, des fleurs, une poupée, un plat de pois au lard, à la mesure de leurs moyens,
qui étaient minces. Les dieux ne se montraient pas exigeants.
Ils étaient pauvres et modestes, comme eux.

Mais dans ce bout du continent qui avait encore des noms changeants, un dieu nouveau s'avançait, venu de Jérusalem, où il était mort et ressuscité,
en même temps qu'il régnait en permanence dans les cieux.

Il balaya devant lui les autres dieux. Ce n'était pas qu'il refusât le partage : 
il n'en avait même pas l'idée. 

Il était l'Unique, il occupait la totalité de l'espace et du temps qu'il avait créés. Il eût, malgré cela, bien toléré les autres dieux, ils ne le gênaient pas, ils étaient éparpillés, minuscules, ils ne se différenciaient pas essentiellement de lui, ils étaient son propre reflet émietté par les miroirs de la vie. Mais une armée de prêtres et de moines intolérants ratissaient en son nom les campagnes, proclamant qu'il était un dieu jaloux, ce qui était faux,
à son niveau on ne peut être ni jaloux, ni vengeur, ni justicier.
La justice se fait d'elle-même dans le cœur des vivants.

Les prêtres et les moines, les uns sincères, les autres calculateurs, tous dans l'erreur, promettaient et menaçaient en Son Nom, promettaient à ceux qui L'adoraient
et Lui obéissaient les délices d'une moelleuse vie éternelle
et menaçaient les mécréants des souffrances abominables de l'Enfer.

C'est ainsi que, par leurs sermons et leurs vociférations, ils coupèrent l'Unique en deux.

Dans l'esprit des croyants alléchés et épouvantés, il y eut désormais en haut le Dieu blanc, dispensateur de la félicité, et en bas le Dieu noir aux dents sanglantes 
et aux mains de feu, qui guettait leurs défaillances. 
C'est ainsi que le Diable, puisqu'ils croyaient en son existence, exista.

En peu de temps – deux ou trois siècles – moines et prêtres conquérants occupèrent le Continent et les îles, au nom de l'Unique, et avec l'aide de la crainte qu'inspirait Son Ombre. Les anciens dieux s'étaient réfugiés dans le fonds des sources ou les racines des arbres, dans l'attente d'un temps meilleur où il leur serait de nouveau permis de se montrer et d'aider les humains, dans la limite de leurs pouvoirs 
et dans l'immense bienveillance de l'Unique père de tout. »

(L'Enchanteur -René Barjavel)

 (Avatar Korra & Toph Beifong)

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